C’est bien joli d’écrire une histoire avec des mots imposés mais comment commencer ? Rien que d’y penser je suis tourneboulée et mon sang se transforme en eau de javel. Je suis là devant ma feuille mordillant mon crayon et me voilà toute barbouillée de carbone ; Je vous vois déjà en train de vous dilater la rate, et rira bien qui rira le dernier ; Je vous observe dans mon encoignure de fenêtre, vous n’êtes pas mieux ; Vous ne passez pas au travers des affres de l’écriture. C’est d’ailleurs paradoxal car d’habitude, nous écrivons sans cesse le poignet souple, les doigts agiles glissant sur le clavier, faisant fi des fautes de frappe ou d’orthographe sans atermoiements et à perdre haleine.
Mais aujourd’hui nous avons tous le visage émacié, les traits tirés à force de réfléchir ; Où vais-je donc placer partir les pieds devant ? Pas facile à placer dans un essai ou une poésie. Si par hasard, au cours d’un banal repas familial on demande négligemment un avis sur telles ou telles phrases et encore avec mille précautions demandons un conseil , aussitôt la tout le monde trouve quelque chose à faire et se retire en bredouillant des « je suis vraiment épuisée, je vais dans les bras de Morphée » ou bien des « je dois téléphoner à Fanchon pour mon devoirs de maths » ou encore des « je vais nettoyer la caisse du chat je sais que cela te soulève le cœur, ma chérie ». Bref là où vous pensiez que votre famille faisait corps avec vos soucis, vous vous apercevez que toute la chambrée se défile. Alors là nous nous enfonçons dans la déprime. Et qui reste pour nous prêter une épaule afin ruminer notre désarroi ? En général le chien ou le chat mais ils savent aussi vous rappeler que c’est l’heure de la promenade. Donc pas question d’écrire une ligne. Mon esprit bat la campagne pensez-vous ? Allez un petit peu d’introspection et vous comprendrez vite que j’ai raison. Et puis demain il fera jour et nous reprendrons tous du poil de la bête.
Et en parlant de bête, j’attrape la laisse de Neige et je vous tire ma révérence.