Ah! Elle était connue comme le loup blanc dans tout le quartier la grosse Suzanne !
A l’époque j’étais gérant du Félix Potin, l’épicerie était coincée entre la rue de la Liberté et l’Impasse aux chats.
Elle portait bien son nom d’ailleurs, une ruelle tellement étroite que les Martin qui habitaient là avaient condamné leurs volets qui donnaient sur l’impasse. Ils ne pouvaient pas les ouvrir tellement ce n’était pas large !
Mais vous vouliez que je vous parle de Suzanne.
Quand je la voyais débarquer dans le magasin, la pauvre, avec ses bas varices, on sentait le plancher vaciller comme quand une rame de métro passait. Je me souviens qu’à chaque fois mes bouteilles de Gévéor s’entrechoquaient, j’appelais ça le carillon de Suzon.
Mais fallait pas se méprendre, Suzanne était une esthète, elle s’appliquait à modeler sa plastique qu’elle me disait en achetant ses tablettes de chocolat. Pour sûr, c’était pas les même tablettes que les gars du club de karaté d’en face.
Avec Mado, ma femme, on est allé visiter son atelier.
Il y avait un de ces désordres : des statues en plâtre partout ! C’était une commande pour un film connu, mais je ne sais plus lequel. En tout cas c’était très beau, genre bustes d’empereurs romains, rien à voir avec des petits anges un peu mièvres qui seraient passés à la trappe illico presto !
Avec le cinéma elle devait palper un paquet de monnaie, c’était pas comme aujourd’hui, avec la vidéo.
Ça paye plus, c’est pour ça qu'elle est partie habiter en banlieue, la Suzanne, c’était devenu trop cher d’entretenir un atelier dans Paris.
Ma femme passe la voir de temps à autres, elles prennent le thé et parlent jardinage.
Pour ça faudrait voir Mado.
Allez, je vous laisse, y a Question pour un Champion qui va commencer et je manque jamais cette émission.