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Il n’y est pas arrivé.

Les trois navires ne sont jamais revenus. Ils ont disparu aux confins du monde. C’est donc vrai, la terre est plate. Les bateaux seront passés par-dessus bord ! Santa Maria, parti au loin, vers un ailleurs impossible, n’a jamais été revu. La Nina et la Pinta sont revenues, avec à leur bord, un équipage fou, reparti aussi vite pour tenter de retrouver la toute belle Maria. Elles aussi sont désormais de grands fantômes errants sur les mers lointaines ou flottants dans l'espace sidéral. Les marins espagnols ne cessent de raconter des histoires de monstres nautiques gigantesques, de sirènes mangeuses d’hommes, de vents terribles criant des blasphèmes et entraînant les caravelles dans une danse folle au-dessus des nuages. Ce sont les histoires entendues dans les tavernes, tard le soir, ou tôt matin, tombées de la bouche des vieux matelots devenus ivrognes, les tenant eux-mêmes des marins retournés à bord des caravelles maudites.

Alors voilà, Colomb s’est planté, et avec lui l’avenir de l’Europe est maintenant une misérable farce.

 Les pays se sont appauvris. Les monarchies redoutent les populaces affamées, malades, pestiférées sans aucun espoir d’une vie meilleure. Il y a bien celle qui suit la mort, ce paradis à la fin de nos jours promis par les prêcheurs de bonne nouvelle.  Ce n’est pas une nourriture pour l’homme du présent. Ils ont faim, ils ont soif, ils ont peur et rien ne vient les réconforter.

 Il a tôt fait de se révolter, ce petit peuple. Les têtes tombent, les cœurs s’arrêtent, les guerres font rage, la rage aussi. Celle de vivre, car malgré tout, l’instinct est là, la vie est précieuse, on n’y renonce pas sans s’y accrocher jusqu’à n’en plus pouvoir. La population des pays européens en est grandement diminuée, seuls les plus forts et les plus rusés survivent. Ils sont peu nombreux, se cachent bien et prennent soin des leurs comme d’eux-mêmes.

 Plus jamais aucun navire ne fut envoyé aux confins des mers. Nous savons qu’il n’y a rien là-bas, rien que la fin, le vide, la déraison. Et pourtant, du sud nous parviennent les échos d’une grande catastrophe. Venu d’un pays d’or et de plumes, dont le dieu est un serpent et les temples des pyramides semblables à celles des Égyptiens, un certain K'uhul ajaw aurait mis pied sur le continent africain. La côte ouest est envahie par des êtres étranges, à la peau cuivrée, cruels et sanguinaires. Ils songent à tenter une percée au nord afin d'y établir ce qu'ils nomment le Nouveau Monde. Nous serons les prochaines victimes de ces envahisseurs. L’avenir sera probablement très difficile. Sans roi, sans armée, personne pour nous guider, une fin atroce nous attend, aux mains d’étranges hommes casqués de plumes, la fin que ces êtres auraient connue, si Colomb ne s’était pas trompé. 

Que sera donc ce Nouveau Monde?

Tag(s) : #Textes des auteurs
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