Depuis des années je voulais me présenter, grâce à vous, c’est aujourd’hui !
Je suis composé de 85 pièces, issue de différentes espèces de bois. L’érable et l’ébène sont les membres principaux de ma famille mais aussi des cousins tels le sycomore, l’épicéa, le palissandre, sont travaillés pour me faire naitre.
On commence par deux planches d’érable, que l’on place cote à cote pour réaliser le fond. Comme je ne supporte ni clou, ni vis, on utilise de la colle d’excellente qualité !
On me forme avec un rabot, doucement, avec doigté, on réalise une voute sur un coté du fond. C’est un travail de professionnel, d’ailleurs Monsieur Stradivarius a mis au point un procédé de fabrication dont les résultats sont exceptionnels ! Mais je ne suis pas là pour parler de lui mais de moi l’un des arbres constituant de cet instrument.
Je suis né dans une belle forêt de Bourgogne, entouré de chênes, de frênes, de boulots. Je me souviens de ces hivers longs et froids, lorsque j’étais comme un bambou ! Chez nous, les arbres, c’est la référence, car, le bambou n’est pas bien gros mais résistant. Au printemps, des oiseaux différents chaque année, venaient faire leur nid entre mes branches. Qu’ils étaient beaux ces couples de pie, tourterelle, s’affairant à la construction de leur domicile éphémère, pour engendrer leur descendance ! J’en ai vu naitre des oisillons sachant à peine se tenir sur leurs jambes maigres et piaillant pour un repas, qui se faisait attendre. Hélas, parfois, l’un d’entre eux faisait une chute et un prédateur venait en faire une bouchée. La dure loi de la nature… Mais heureusement, certain de ces enfants venaient se loger chez moi, comme leurs parents, à l’âge adulte.
L’été, c’était la fête, la forêt grouillait de vie, avec toutes les naissances. La biche, le cerf, le sanglier, combien sont venus se frotter à mon écorce ! J’observais les lièvres et lapins bondissant dans les fougères pour chercher une plante à consommer. Les merles, les grives, les perdrix tout ce joli monde circulait de branche en branche…
Un écureuil aimait à venir l’après-midi, se mettre à l’abri du soleil, sur une de mes charpentières. Il avait toujours avec lui quelque chose à grignoter… (l’épargne d’un bucheron ?).
L’automne arrivait, les peintres et leur chevalet venaient fixer ce moment magique de l’explosion des couleurs. Le feu, le marron, l’ocre, le vert, et les quelques champignons qui poussaient à mes pieds avec leurs points blancs sur fond rouge ! Je ne voyais pas le temps passer…
Puis l’hiver, le froid, le vent qui emportait parfois une branche malade. Je résistais du mieux possible mais souvent il était trop fort. La neige me pesait, car avec le froid elle durcissait et j’avais du mal à la supporter…Heureusement le soleil dans un clin d’œil venait me soulager.
Vous vous demandez pourquoi le violon émet-il une si jolie musique ? Réfléchissez ? Chaque morceau de bois, le constituant, à une belle histoire au fond de lui et c’est la libération de ces moments que vous entendez ! La peine, la morosité, la joie tout cela est restitué.
Rendez-vous compte, je termine ma vie sauvage pour renaitre dans les mains d’un luthier me donnant une vie presque éternelle !