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Les roues du train crissent sur les rails, j’ouvre les yeux, paniqué. Où suis-je ? Je me suis assoupi, cédant à la fatigue de ce trop long voyage. L’esprit encore embrumé, je jette un coup d’œil rapide à ma montre. 15h05. L’heure d’arrivée de mon train dans cette ville. Le crissement des roues s’amplifie, je saisis ma valise et me précipite vers la porte. D’un bond, je suis sur le quai. Je traverse la gare, une gare semblable à toutes les autres ou presque.

Des taxis attendent, les uns derrière les autres. Des voyageurs sourient à des visages reconnus. On s’embrasse, se tapote l’épaule, on se serre dans les bras, les valises changent de main. Tu as fait bon voyage ?

Personne ne m’attend. Je reste un moment indécis devant la façade imposante de la gare. Le temps est gris, la chaussée encore mouillée de la dernière averse, un vent glacial s’engouffre sous ma veste. Je la boutonne et remonte mon col. Me voilà seul sur le parvis de la gare de cette ville que je ne connais pas.

Mon rendez-vous n’est qu’en fin d’après-midi et j’avais prévu d’arriver plus tôt pour visiter la ville. Dès que je m’éloigne de la gare pour m’aventurer vers ce qui me semble être le centre-ville, je sens comme un étourdissement naître en moi. Je me dirige à pas lents le long de l’avenue la plus large. Toutes les maisons qui la bordent sont identiques. Maisons étroites et hautes de deux étages façade de brique austères sous ce ciel gris, hautes portes en bois. D’un bout à l’autre de l’avenue, c’est un alignement de maisons serrées les unes contre les autres, toutes les mêmes. Je longe les façades pour éviter la pluie qui tombe dru maintenant. Les pavés sur la chaussée brillent comme s’ils avaient été cirés.

Je quitte l’avenue pour rejoindre de plus petites rues derrière, là encore l’architecture est identique. Je me perds dans des entrelacs de ruelles jusqu’à ne plus savoir d’où je viens et vers où je dois me diriger. Un sentiment de panique monte en moi. Je me sens totalement perdu, moi qui pensais pourtant avoir un assez bon sens de l’orientation. Les trottoirs sont déserts, il n’y a pas âme qui vive. La pluie a chassé les passants et les rares personnes que j’aperçois disparaissent aussitôt, pressées de rejoindre un abri. Je suis seule dans cette ville inconnue et déserte et cette pensée m’obsède. SEULE....INCONNUE….DESERTE.

Ces trois mots tournent en boucle dans ma tête.

Il n’en faut pas plus pour qu’un sentiment de mal être profond s’installe en moi. Au bout de la rue, un canal à l’eau boueuse me barre la route. La pluie en tombant en hérisse a surface.

Je suis maintenant trempé, je voudrais trouver un endroit chaleureux où m’abriter et me sécher mais je ne trouve sur mon parcours aléatoire aucun lieu digne de m’accorder cette pause salutaire, le temps d’un café et de paroles réconfortantes.

Je fais demi-tour et retourne vers le centre. La place principale sur laquelle trône l’hôtel de ville imposant ne me paraît pas plus accueillante que les rues que je viens de quitter.

Dans un état de panique total, je me précipite dans le premier café ouvert de la place. L’intérieur était assez sombre, un énorme écran plat crache des images, un feuilleton certainement. Le serveur, quitte à regret d’un pas nonchalant le siège d’où il regarde la télévision pour prendre ma commande. Ce n’est pas vraiment l’ambiance dont je rêvais mais au moins je suis à l’abri.

Heureusement, l’heure de mon rendez-vous approche. Je ne peux pas imaginer passer plus de temps dans ce bar entre une télé hurlante et un serveur renfrogné. Dehors, la pluie tombe toujours. Aucune envie de parcourir d’autres rues. Aucune envie de rien.

Je décide de me rendre immédiatement à l’adresse de mon rendez-vous griffonnée sur mon agenda : 11, rue de l’Industrie. Par bonheur, le serveur m’explique que je n’en suis pas loin et m’explique le chemin à suivre.

« Au bout de la rue, à droite, vous ne pouvez pas vous tromper » 

Toujours les mêmes façades blotties les unes contre les autres. Je sonne au numéro 11. Des bruits de pas et un visage souriant apparaît dans entrebâillement de la porte.

« Jacques, entre donc. Je suis tellement heureuse de te revoir. Mets-toi à l’aise et viens prendre quelque chose de chaud. Tu es trempé ».

Je pose ma valise et accroche ma veste mouillée au porte manteau.

Je me sens tout à coup très léger dans cet intérieur chaleureux.

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