Dans la lueur blafarde des phares, il distingua une silhouette féminine sur le bas-côté de la route départementale qu’il empruntait comme chaque soir quand il rentrait de soigner ses vaches à la stabulation.
Est-t-elle en panne ? s’interrogea Albert. Ne va-t-elle pas se méprendre sur mes intentions si je propose mon aide ? En douceur, il ralentit ...
Arrivé à sa hauteur, il baissa la vitre de la portière droite. La femme se pencha à hauteur du conducteur. La chevelure encadrant son visage faisait ressortir son teint laiteux.
- Monsieur, ne croyez pas qu’à cette heure-là, j’en sois à batifoler sur les berges de la Dordogne.
Maladroite comme il n’est pas permis, j’ai glissé, je me suis étalée sur la rive et lâché la corde avec laquelle je devais arrimer ma chaloupe. Avec le courant, elle a déjà dépassé la Chapelle des Pénitents de Beaulieu où j’ai l’habitude de l’ancrer.
- Si vous ne redoutez pas l’odeur du fumier de mes vaches qui colle à mes brodequins, les fragments de paille collés au siège, je peux vous ramener à Beaulieu.
- C’est aimable à vous, mais cela va retarder votre retour à la ferme … A Chamalières, je crois ?
- Oui, Chamalières de Chenaillers-Macheix. Mais comment connaissez-vous ce lieu-dit ?
- La pêche, mon bon Monsieur ! La pêche, et du bord de l’eau, je vous ai aperçu quand vous fauchiez la prairie ; renseignements pris auprès d’un autre pêcheur, j’ai su que vous habitiez ce village au nom célèbre.
- Je ne me prénomme pas Valéry, je ne joue pas de l’accordéon, mais je suis Président de la société de chasse …
Et je peux vous reconduire à Beaulieu-sur-Dordogne.
- Monsieur le Président, je suis très honorée !
- Albert, tout simplement …
- Moi, c’est Monique !
Qui sait si Albert, célibataire endurci et Monique divorcée depuis quelques lunes, ne vont pas, ensemble chevaucher au- delà du covoiturage du jour vers la cité bellocoise, dite Riviera du Limousin. Chez Monique et Albert à la cinquantaine dépassée, la perspective d’amour n’est pas moribonde ...