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J’ai appris, tout à fait par hasard, le décès de Jolaine, mon amie d’enfance. Elle habitait à deux rues de chez moi et depuis la maternelle nous étions toujours ensemble, les meilleures amies du monde. En première année du cours secondaire, David s’est joint à notre duo, nous sommes devenus un trio qui ne se quittait jamais. David était drôle, énergique et avait la tête remplie de projets auxquels nous adhérions toujours. Jolaine a fini par être amoureuse de David et David de moi. Entre nous trois, tout s’est brisé. Après quelques disputes, des tonnes de reproches et des insultes comme seuls les adolescents sont capables, les liens se sont effrités d’abord, puis définitivement coupés entre nous trois. Avec toute l’intensité de l’adolescence, nous nous sommes éloignés les uns des autres sans jamais plus se donner de nouvelles.

 Apprendre la mort de Jolaine m’a fait réaliser combien cette discorde avait été immature mais nous avions l’âge que nous avions et avions agi comme tel. La vie a passé, à l’université j’ai rencontré celui qui allait devenir mon mari et le père de mes deux enfants. Dix ans plus tard, nous sommes divorcés et depuis je conjugue avec les aléas d’une famille brisée tout en essayant de préserver une joie de vivre à transmettre à mes enfants. Pas toujours facile. Maintenant, je me demande, sans trouver de réponse, ce qu’a été sa vie d’adulte à elle.

 J’ai voulu assister à ses funérailles, sa mort m'ayant profondément secouée, elle a également déterré de vieilles blessures. On s’aimait tant toutes les deux, on avait eu tant de plaisir ensemble. Aujourd’hui, je constate combien il est triste que nous nous soyons perdues de vue. J'ai donc décidé d'aller lui confier ma déception sur sa tombe même si je ne saurai jamais si elle pensait encore un peu à moi, parfois.

 Je suis arrivée avec un peu de retard à la cérémonie, c’était voulu, je me voulais discrète. Je me suis assise dans les dernières rangées.  Il y avait bien longtemps que je n’avais pas mis les pieds dans une église. L’odeur, l’ambiance, la quiétude qui s’en dégagent m'ont ramenée à mon enfance, à notre première communion et notre confirmation, toujours l’une aux côtés de l’autre. Je me suis imprégnée de cette sensation de paix ressentie chaque fois que je suis entrée dans un endroit de culte. J'ai été étonnée qu’après toutes ces années, je reconnaisse tout de suite ses parents, son frère Marc, et j’ai eu mal de les voir si profondément attristés. Une grande émotion m'a alors envahie et les larmes ont coulé sur mon visage sans aucune pudeur. J'ai fermé les yeux pour mieux me recueillir et me confier à Jolaine, mon amie, ma sœur.

 Durant ce moment d’une grande intensité, j’ai sursauté lorsqu’une personne m’a étreint la main avec fermeté. J’ai ouvert grand les yeux et j'ai reconnu David debout à mes côtés. Il semblait aussi ému et triste que moi. Il s'est penché à mon oreille et a murmuré :

 -        Je suis là Martine, ressens-tu comme moi sa présence à nos côtés ?

 J’ai, à mon tour, serré très fort sa main, je me suis appuyée sur son épaule, heureuse de sa présence à mes côtés. À mon tour, je lui ai chuchoté, les sanglots dans la voix :

 -       Nous voilà à nouveau réunis, tous les trois. 

Tag(s) : #Textes des auteurs
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