P208 Christ'ailes – sans titre

Un jeu... Il appelait ça jouer ! Pourquoi pas. L'idée, finalement, lui plaisait. Elle menait sa vie, sûre d'elle et indépendante. Les enfants étaient partis vivre la leur. Elle était bien établie socialement. Et il était revenu un beau jour dans sa vie, comme les amis vont et viennent. Mais cette fois, tous les deux approchaient d'un changement de dizaine. Bientôt 50 ans. La force et l'enthousiasme encore mais en tendant l'oreille, ils entendaient les tictac de l'âge qui s'avance.

Un jeu pour elle qui restait une éternelle gamine ; ça ne pouvait que l'intéresser. Mais un jeu d'adulte, un jeu de grands et pour tout dire un jeu nouveau pour elle. Nouveau et intéressant, stimulant, excitant. Un jeu aussi trouble que troublant. Le laisser l'emmener sur ces chemins secrets, est-ce une bonne idée ? Prendre le risque de se tromper... D'avoir mal... Mais aussi de partager... de vivre... avec intensité... Elle hésitait entre peur et curiosité.

Elle avait juste besoin de sentir qu'il lui tiendrait la main, qu'il ne la lâcherait pas dans les moments du plus sombre et doute. Et elle l'avait senti. Et elle s'était abandonnée. Confiante. Peut-être, sans doute ? pour la dernière fois de sa vie pensait-elle. Et ça lui donnait le vertige. IL lui donnait le vertige. Il déboulait dans son quotidien et y semait un surplus de vie. Un énorme surplus, autant de plaisir et de désir que d'appréhension parfois.

Son « jeu » donnait à ses jours une intensité qui lui avait été inconnue jusque-là. Leur complicité était sans borne. Leurs émotions sans cesse renouvelées. C'était une addiction. Et la dose était à chaque fois un peu plus forte. Elle se sentait plus vivante que jamais. Plus complète que jamais quand il était là. Enfin entière, réalisée, épanouie. Il lui avait fallu attendre près de 50 ans pour en arriver là. Et ça en valait la peine...

Mais un jour, il est parti. Sans raison, sans explication. Peut-être usé par tant d'intensité. Elle s'est sentie brisée. Brisée par cette solitude. Mais en même temps tellement forte de ce qu'elle avait osé. De s’être aventurée dans ces terres si sauvages pour elle. Ce jeu l'avait grandie. Et malgré la souffrance causée par cette fin brutale, elle n'avait aucun regret. Elle était heureuse et fière d'avoir osé ! Heureuse et fière de l'assurance qu'elle avait gagnée par ce jeu. Seuls ces sentiments importaient désormais. Et la reconnaissance qu'elle gardait pour cet homme qui avait si bien su l’entraîner dans son jeu...