P205 Marie-Helene - Rose

Rose somnolait sous les feuillus aux feuilles retrouvées, laissant son esprit dériver à son gré dans ses souvenirs.

Elle n’avait pas été si facile sa vie, non, elle n’avait pas choisi de se vouer corps et âme à la ferme familiale mais elle n’avait aucun regret. Elle aurait voulu être musicienne, mais les sonates de Vivaldi ont été remplacées par un calendrier immuable : l’hiver puis l’allongement des jours qui amène la délivrance avec l’arrivée des premiers bourgeons, les semailles, regains, l’odeur du foin fraîchement coupé et celle qui s’exhale des roses buissons turbulentes, les coquelicots dont la tête dodeline au milieu des blés, et les tournesols comme autant de soleils à perte de vue. Des rires, des pleurs aussi et son Jacou surtout avec son sourire qui ensorcelait les femmes à la fête du village. Il était parti à la « der des der » et jamais revenu. Il lui avait laissé « Toinette » qui avait le sourire de son père et une joie de vivre qui lui avait permis de rester debout. Elle avait continué sa vie, travaillé dur parce que la terre n’a que faire des chagrins des hommes qui la travaillent.

Et maintenant au crépuscule de sa vie non...elle n’avait aucun regret. Sa peau parcheminée racontait son histoire, ses mains calleuses posées sur son tablier noir ne tremblaient pas, seuls ses yeux délavés perdaient doucement leur éclat.

Et Rose elle vécut….