P199 Dominique - L'ours de saint nicolas

Ma vie a commencé dans l'est de la France, un 6 décembre à la saint Nicolas.

C'est ce jour-là que les parents d Eléonore offraient des cadeaux à leurs enfants. Dans cette famille catholique le père noël, bon vivant au ventre rebondi, était jugé immoral.

Assis à côté d'un pain d'épices à l'effigie du saint, j'attendais.

Quand l'aurore commença à poindre, mon cœur de petit ours en peluche battit

la chamade.

J’eus beaucoup de chance, la petite Eléonore me couvrit tout de suite de tendres baisers. J'étais son seul cadeau.

Je connu alors des jours heureux, je partageais ses repas, ses jeux, ses promenades, partout où elle allait, j'étais avec elle. Quand elle était triste, je l'étais aussi, quand elle riait, je riais, quand elle se fâchait, je fronçais les sourcils, quand elle dormait, je veillais.

Malheureusement les enfants grandissent, mais les ours en peluche restent éternellement des doudous. Elėonore me rangea au fonds de son armoire. Ce fut pour moi le début de longues années d'hibernation. Je perdis la notion du temps, mes yeux devinrent aveugles. Plus personne n'entrait dans la chambre, Eléonore avait quitté la maison.

Le soleil arriva un jour de printemps. L'armoire s'ouvrit, laissant pénétrer une lumière éblouissante, je reconnu tout de suite son odeur, sa voix avait changé, c'était celle d'une adulte.

Elle me trouva, me saisit, elle me regarda un instant, je lus dans ses yeux une pointe de nostalgie.

Deux petites filles lui tenaient sa jambe. Elle me tendit à la plus grande.

-" Le voilà mon ours, dit-elle, tu sais il est un peu vieux, c'est un grand père ours."

La fillette me pris dans ses bras, elle avait les mêmes yeux que sa maman, tendres et malicieux.

-"Je peux le prendre pour jouer ? " demanda-elle

- "bien sûre " répondit Eléonore

Mon cœur se mit à battre, comme au premier jour. C'est ainsi que commença ma deuxième vie d'ours, mais ça, c’est une autre histoire...