Les tranches de chorizo grillaient sur la pizza. Marc se frotta les mains : il allait se régaler !!!! Pizza, match de foot, la soirée idéale pour lui. Il attrapa ses couverts d'un air conquérant quand la sonnette de la porte se fit entendre. Le sourire béat disparu de son visage. Au deuxième coup de sonnette il se leva en soupirant.
- Oui ? dit-il à l'interphone d'un air excédé
- Salut tonton, c'est Geoffroy
- Ah ! Oui bonjour, euh attends, je t’ouvre
Mais que venait faire son neveu à une heure pareille chez lui ? Il ouvrit quand il entendit la porte de l'ascenseur s'ouvrir.
- Eh tonton comment vas?
- Ca va, ca va dit-il d'un air joyeux mais plus que feint
- Ecoutes, on a pas réussi à rentrer au stade, paraît que nos billets sont faux, chais pas quoi. Alors je me suis dit comme on était pas loin de chez toi, que ça te dérangerais pas si on venait voir le match chez toi ? Hein tonton ?
Marc regarda son neveu et ses cinq copains, tout souriant, l'air confiant.
- Non, bien sûr, rentrez, rentrez.
- Super tonton
Et ils s'installèrent comme s'ils étaient chez eux dans le salon de Marc. "Waouh cool de la pizza" et le sacro saint diner disparu en un clin d'œil et trois mouvements de mâchoires juvéniles.
Les épaules de Marc s'affaissèrent. "Ma pizza..." pensa t-il désespéré.
Il alla à la cuisine et rouvrit son frigo. Les œufs qu’il avait dédaignés tout à l’heure lui sautèrent aux yeux. Il commença à les casser dans un bol.
- Eh tonton t’as pas des bières ?
- Est-ce que j’ai l’air d’être un barman ?
- Euh...
S’en voulant de sa mauvaise humeur devant l’air interloqué de son neveu il rajouta :
- Dans le frigo, tiroir du bas
Il continua à battre ses œufs, rajouta de la ciboulette, du sel, du poivre et versa le tout dans la poêle où le beurre fondait. Il sortit une salade, la lava, et tout en surveillant son omelette se fit une sauce aux échalotes. La cuisine embaumait. Il se sortit une assiette, un verre, la bouteille de vin du frigo et mit le tout sur un plateau. Il allait rejoindre le salon quand un des copains à son neveu ouvrit la porte des toilettes brusquement renversant omelette, salade, bouteille de vin et sauce sur sa chemise, éclaboussant au passage les peintures des murs et la moquette... Marc regarda le jeune homme, le plateau renversé, le désastre ! « Pardon Monsieur, pardon ! ».
Marc, sans rien dire, alla au cagibi, sorti un seau, un balai, une serpillière, des éponges et tendit le tout au gamin qui s’exécuta. Lui alla dans la salle de bain, enleva ses vêtements sales, enfila son vieux jogging percé, troué et retourna au salon. Il chercha sur son téléphone le numéro de la pizzeria, en face de chez lui. Il allait commander une pizza quatre fromages quand il sentit sur lui six paires d’yeux . « Je voudrais..." "sept pizzas quatre fromages s’il vous plaît, oui comme d’habitude à la même adresse, merci ».
Il s’installa enfin dans son fauteuil, et commença à se détendre en regardant le match qui avait commencé depuis une bonne demi-heure.
La sonnette de la porte retentit. Aucun des jeunes ne prenant la peine de se lever, il alla ouvrir, paya les sept pizzas, remplit un formulaire de satisfaction et retourna au salon les bras chargés des cartons, fendit la foule de jambes et de pieds qui le regardaient d’un air rétif de les déranger durant le match !!!! Mais ce n’était pas grave, il allait enfin manger SA pizza.
Il ouvrit le carton, voyant déjà le fromage fondu couler sur ses doigts... Des poivrons ? des tomates ? des bouts d’asperges ?????!!!!! Une VEGETARIENNE !!!!!!!
C’était bien la preuve, si besoin en était, que quelque chose ne tournait pas rond !