Elle a vécu, seule, pendant quelques mois ... Il l'avait quittée subitement pour rejoindre le Royaume des cieux.
Ils avaient vécu, depuis leur mariage dans les années vingt du siècle dernier, dans une maisonnette, à la lisière d'un bourg des Grands Causses, d'où émergeait un clocher d'un petite église. Ils travaillaient , alors , tous les deux , chez un riche éleveur d'ovins : lui berger, elle femme à tout faire: ménage, traire les brebis, battre le lait.
A la fin de la vie active, ils menèrent une vie retirée, une vie d'anachorète. La bicoque où ils vivaient était petite , modeste, sans eau courante ni cabinet d'aisance; un chalet, situé à quelques mètres de là, dont les clefs sont , toujours, appendues à la grande patère , suffisait... Ils ne sortaient que le dimanche pour se rendre, le matin ,à l'église , pour l'office du matin .
Après la mort du conjoint , pour subvenir à ses besoins, elle vendit le grand lit , le réchaud, les divers vieux meubles , acheta un lit métallique d'une place; elle garda le petit buffet à deux portes , au tiroir sculpté , sur lequel , elle posa pêle-mêle tout ce qu'elle avait jugé utile, nécessaire à sa survie :Les ustensiles de cuisine ( faitout, assiettes , cuillères moulin à café...) la nourriture ( miche de pain, saucisson , légumes, fruits , douceurs ...) tout à portée de main.
Elle n'avait plus notion de temps: l'éphéméride mural a perdu, depuis longtemps, la dernière feuille datée.
Elle attendait et espérait une fin rapide. La mort vint... Le temps figea la demeure telle que l'avait disposée la défunte; permettant ainsi , à l'araignée de tisser, tranquillement , des toiles montant à l'assaut de la porte entre- ouverte et , aux gastéropodes, toutes
cornes dehors, de ramper vers le haut du buffet.