Une image peut en cacher une autre…une expression familière, aussi…
Je suis allongé là, perdu dans mes rêveries.
Un nuage, Grande-Bretagne aux contours incertains, m'emmène.
La rencontre d'un éléphant, quelque peu déformé, et me voilà ailleurs.
L'herbe est douce à mon corps. Je me repose, ne pense à rien ; ou bien seulement traversé par des sensations de bien-être ; calme et volupté de ne rien faire.
Une voix ne parvient pas à troubler mon « farniente ».
- Julien !!!!
- Où il est, encore çuila ? Ce bon à rien.
- Sûr qu'il a pas inventé la poudre, mais là, c'est l'heure de rentrer les vaches. Il est pas dans le pré. Où est-ce qu'il traîne encore, ce feignant ?.
« Il a pas inventé la poudre » Combien de fois l'ai-je entendu cette phrase?. J'ai pas inventé la poudre, ça non. Surtout celle qui nourrit les canons, et j'en suis très fier. Au moins, je ne suis pas responsable des millions de morts, qu'elle a pu causer.
Il y a bien la poudre de Venise, celle qui me fait rêver à La Sérénissime. Mais je n'en suis pas l'inventeur.
Je pense à la poudre de riz, terme qui m'intriguait quand j'étais petit. Maintenant, je sais que celle-ci s'obtient par broyage du riz complet. Je revois une image de personnage, corps tout entier protégé du nuage de poudre. Il me reste la vision d'un être ridicule et effrayant à la fois, un cône de papier, si long et si pointu, dans le prolongement de son nez. Allure grotesque d'un personnage de la Commedia Dell'arte, où rapace surgi de ténèbres infernales.
Alors, il reste la poudre de perlimpinpin. Joli mot. J'aurais aimé l'avoir pour prénom.
- Julien !!!
Même si je veux encore rêver. « Perlimpinpin, rejoins-nous. Ne l'écoute pas. Laisse-la prêcher dans le désert. »
Hélas, les ennuis se rapprochent, fini de voyager dans les espaces imaginaires.
- Julien !!!Bon à rien.
Tiens, la patronne fait dans la poésie. Il faut que je réponde.
- Voilà, voilà, madame Firmin. De ce pas, je vous rejoins.
- Où te caches-tu, espèce de vaurien?
- Dans la lavande et le romarin. Les vaches aiment bien.
- C'est quoi encore ces sornettes ?
- Surtout les vachettes.
- Tu me fais un fichu vacher, en attendant. Rentre les vaches. Il se fait tard.
Fini la poésie. J'ai bien cru que j'arriverai à me sortir de la poussière. Vacher je suis, et je dois. Vacher je resterai.
Je rassemble mon troupeau. Ma houlette invisible remplit son rôle.
Demain, je repartirai vers une autre vie. Ce ne sera ni la première, ni la centième fois, que je m'évaderai en pays d'Oisiveté.