Le soleil se lève. Rayon ocre foncé léchant ce coin de pièce. Mes rêves de silence se déchirent sur le premier cri de marmotte.
En écho, celui d'une buse.
Sur mon cou, une caresse humide. La truffe affectueuse de mon berger des Pyrénées, si heureux de mon réveil.
Je pousse lentement la porte en bois. Grincements magiques. Musique pure et familière dans la lumière intense qui, déjà, m'assaille.
Chaque brin d'herbe me salue. Ebouriffé. Irradié de rosée.
C'est le premier appel. Bêlement tremblant, émouvant, de mes chèvres impatientes. Mon chien jappe, fou de joie à l'idée de leur délivrance.
Je les flatte, une à une, m'imprégnant de leur parfum de poils, chauds et secs. Certaines me gratifient d'un dernier regard, avant de s'éparpiller à la recherche d'arbustes odorants.
Je rejoins le chalet. Une flambée de bois mort dévore mes doigts gelés, tandis que mon compagnon lape en rythmes saccadés le lait de la veille, déjà caillé...
Mes yeux se plissent à la fenêtre. Eblouis.
Débordant de reconnaissance, je coupe une large tranche de ce bon pain aux relents de thym et de sauge. Etaler le fromage frais, doucement salé, et sortir le vin. Le vin de la vigne dure, capricieuse, à flanc de coteaux...
Jusqu'au soir je foulerai les rochers. Grimpant toujours plus haut, en quête de champignons et d'herbes sauvages. Surveillant, de loin, mes bêtes dispersées...
Dans mon coeur un seul espoir, celui de me repaître du chant d'un torrent.... D'apercevoir au creux des pierres un troupeau de chamois...
Ou de suivre, comme un cadeau, le vol de l'aigle à l'affût...
La vie s'écoulera, éternelle sous le temps.
Hors du temps.