LA FEMME, très calme.
Un homme attend sa femme. Il commence à s’impatienter. Le repas est servi depuis déjà une demi-heure. Il s’assied dans le fauteuil où il se ronge les ongles, se remet debout et recommence à faire les cent pas.
La femme rentre.
L’HOMME
Mais où étais-tu donc passé ?
J’avais à faire, très cher !
L’HOMME
C’est tout !!! Tu ne vas même pas me donner une explication quitte à me mentir ?
LA FEMME
Non, même pas.
L’HOMME
Quelqu’un ne pouvait-il pas y aller à ta place ?
LA FEMME
Est-ce que tu délègues quelqu’un pour aller aux toilettes à ta place ?
L’HOMME, rouge d’indignation, ne peut rétorquer.
LA FEMME
Non. Eh bien là, c’est pareil.
L’HOMME
Je te trouve bien indisciplinée en ce moment.
LA FEMME
Je ne suis pas ton esclave.
L’HOMME
Oh le grand mot ! ( Levant ses bras au ciel ) Oserais-tu dire que tu es malheureuse avec moi ?
LA FEMME
Non, je n’oserais pas. (D’un ton doux)
J’aurais préféré attraper la peste plutôt que de te connaître.
J’aurais préféré être déportée plutôt que de croiser ton chemin. (Le fixant de toute sa haine)
L’HOMME
Mais que racontes-tu ? Je ne comprends pas.
LA FEMME
Ne me lorgne donc pas de ce regard putride ! Tu me salis !
L’HOMME, choqué, garde le silence.
LA FEMME
Tu ne m’as jamais comprise. Je suis bien vivante. Je ne suis pas juste un mirage qu’on observe de loin.
L’HOMME
Mais tout semblait te convenir ainsi !
LA FEMME
Jusqu’au jour où j’ai enfin ouvert les yeux.
L’HOMME
Tu as rencontré un autre homme ! (Avec le ton de l’élève modèle qui trouve la bonne réponse).
LA FEMME
Non, mais ça ne saurait tarder !
L’HOMME, interloqué.
Comment ça ? Tu sais à l’avance ce qui va se produire ?
LA FEMME
J’ai mes sources !
L’HOMME, fronçant les sourcils afin de réfléchir aux insinuations mystérieuses de sa femme.
LA FEMME
Une très bonne source même !
L’HOMME
Moi aussi j’ai mes sources. J’apprendrai bien vite qui te met des âneries dans la tête.
LA FEMME
La voyante. (D’un ton tranchant, un sourire démoniaque sur les lèvres).
L’HOMME, se reculant de sa femme comme si elle était le diable en personne.
Il me semblait que tu ne croyais pas à toutes ces sorcelleries.
Qu’est-ce que tu peux être lunaire !
LA FEMME
Lunatique qu’on dit ! D’ailleurs, il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis.
L’HOMME
Je te parie qu’elle a été très vague dans ses prophéties. Je vois de grands bouleversements dans les jours à venir. (Il prend une voix rauque et simule un état de transe en tremblant de tout son corps et en ayant ses yeux qui se révulsent ).
LA FEMME
Arrête tes singeries. Elle m’a certifiée que je rencontrerai l’âme sœur samedi prochain lors d’une soirée.
L’HOMME
Je vois qu’elle avait bien astiqué sa boule de cristal cette fois. ( Se moquant ouvertement ).
LA FEMME
Mais il ne s’agit pas de n’importe quel homme. Il s’agit de mon premier amour, celui que je n’ai jamais cessé d’aimer. (Elle se fait volupté au souvenir de son ancien amant ).
L’HOMME
Peut-être regrettes-tu votre rupture, mais tu ne pourras jamais retrouver un homme avec une érection aussi gigantesque que la mienne !
LA FEMME
Oui mon chéri, tu bandes comme un étalon ! ( flatteuse)
Mais lui, c’est un véritable éléphant ! (Assène-t-elle sans pitié).
L’HOMME, s’effondrant dans le sofa.
Me voilà vacuité ! (d’une voix plaintive).
LA FEMME
Vacuité !! Ah ! Ah ! Ah ! (S’exclame-t-elle railleuse). Que tu es cuit, ça ça ne fait aucun doute. Que tu vas te cuiter, ça ça ne me concerne plus !
L’HOMME, se relevant prêt à combattre.
Je vais la trouver ta voyante, et crois-moi, je vais lui faire bouffer sa boule de cristal, et lui taillader les veines à coups de cartes. Je vais en faire de la pâtée pour chien, et tu pourras consulter les osselets avec ses restes !
LA FEMME
Attends ! Ne lui fais pas de mal ! (Elle courre derrière son mari afin de l’empêcher de mettre son plan à exécution).