Cela faisait des jours et des nuits que Princesse Zaïna habillée du bleu traditionnel, symbole de paix, de calme et de volupté, marchait dans le désert.
Elle avait été désignée pour combattre la prophétie. Cela consistait en l'érection d'une statue au temple de Bokary. Afin d'implorer la miséricorde des dieux, elle devait déposer la sculpture, taillée dans le bois d'ébène et qui pesait si lourd dans son dos, sur la plus haute marche de l'hôtel des sacrifices.
Si elle échouait, les prédictions de Pongwa, le sorcier se réaliseraient : d'autres, toujours plus nombreux, contracteraient la peste et seraient condamnés à la déportation, d'autres mouraient dans une odeur putride.
Elle n'avait pas hésité à se lancer seule dans l'aventure, fière d'avoir été choisie. Elle aurait pu déléguer sa mission à un homme de son rang, Nyamu, son père, l'avait exigé mais pour la première fois telle une enfant indisciplinée, elle lui avait désobéi. Elle n'avait pas voulu se soustraire à ce qu'elle considérait comme son devoir envers son peuple: les Dieux avaient parlé à Pongwa, ils en avaient décidé ainsi, elle était l'élue ! Était-ce de la vanité ?
Aujourd'hui, le doute l'envahissait : elle mesurait la folie de son entêtement, de son orgueil.
Elle était exténuée et elle n'avait presque plus d'eau. Là, sous la chaleur torride, perdue dans l'immensité de sable, elle percevait douloureusement la vacuité de l'existence.
Elle commençait aussi à ressentir le mal du désert. Plusieurs fois, elle avait cru apercevoir le temple mais ce n'étaient que mirages.
Plusieurs fois, elle avait failli abandonner mais la survie de son peuple était entre se mains ! Alors, Zaïna s'agenouillait, puisait force et courage en communiant avec ses ancêtres, se relevait péniblement, se ressaisissait, et poursuivait dans le paysage lunaire, son inexorable marche vers le temple.