Mon nom ressemble à une équation ?
Je sais. Il me va comme un gant. Un gant renversé qui garde en son vide l’empreinte de la main qui l’a pénétré.
Pour faire mon éloge il faut donc faire le portrait d’une inconnue, extraire mes racines, carrées, bien entendu, tracer mes coordonnées, esquisser mes bissectrices, réduire ma complexité.
J’aime la froide abstraction, la pure vérité, l’austère nudité du squelette. Je hais la chair, la peau et ses frissons de soie, vaines fioritures de la littérature. Ma pensée, scalpel, va droit à l’essentiel. Dans les êtres humains je ne vois que fonctions, impersonnels facteurs, puissances dépourvues de sens. Je ne sais de figures que géométriques, d’esprit que de sel, de joies que scientifiques, je ne sais de problèmes qu’algébriques. Quand on me dit « misère » je sors mes statistiques, quand on me dit « prières » je réponds « solutions », quand on implore pitié je dis « probabilités ». Je ne cherche pas la sympathie.
Ma vie fut toute droite, et jamais brisée, portant vers l’infini d’immuables visées que nulle incidente jamais n’a détournées. J’ai l’inexorable éternité des certitudes, je vise l’altitude des sphères éthérées. Je suis…
Suis-je ?
Dans mon abstraite perfection je ne suis que l’x, l’inconnue toute nue, le pur squelette, fonction sans âme, ombre portée, étique radiographie.
Je suis, dans le miroir, le reflet inversé que scrute anxieusement le regard de Josée.