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L’âme respire une dernière fois l’air poussiéreux de sa ville.

Le nuage soudain qui l’envahit est si épais qu’il en étouffe les cris.

Au-delà du grondement du tonnerre, l’éclair brusque a frappé au cœur de la cité.

 

C’est sous un soleil radieux que commence cette nouvelle journée.

Elle, se réveille dans les premiers bruits de la circulation et l’odeur du thé.

Le soleil monte doucement, bougeant les ombres pour mieux se remettre en place.

 

Après une toilette rafraîchissante, qui a fait fuir les dernières toiles d’araignée de sa nuit, elle se change,

grignote vite fait les miettes qui traînent de son modeste repas de la veille, prépare ses affaires et quitte son domicile, le cœur léger.

 

Les rues se nourrissent des vibrations des moteurs, des grincements des vélos, des cris d’enfants s’interpellant d’un bord à l’autre de la chaussée.

Des chiens aboient au passage des véhicules, en vain épuisement, les mécaniques ignorant leurs jérémiades, poursuivant leur chemin, s’entassant

dans le moindre recoin comme si un aimant géant les drainait dans la même direction.

 

Elle se rend au centre commercial où se déroule le marché du jour, salut l’épicier au coin de la rue, qui lui rend son sourire brillant dans un reflet édenté.

Tout semble la charmer, les cris, les rires, le brouhaha des petits attroupements perdus dans les salutations du matin. Oui, tout cela l’enchante, c’est la vie.

Elle s’avance sous le couvert de la halle. D’entrée, les odeurs mêlées de fruits, de cuissons et de thés viennent l’envelopper dans un charme tourbillonnant.

Les couleurs des étales s’affichent dans un contraste alléchant.

Elle glane des bribes de conversations ça et là, saluant quelques connaissances, acquiescent un bonjour de convenance aux habitués de passage.

Elle regarde avec envie les broches de viandes grillées que malheureusement le poids de son porte-monnaie ne lui permettra pas d’atteindre.

Qu’importe. Du pain, quelques fruits, deux ou trois légumes viennent garnir son panier.

C’est son bonheur quotidien avant d’aller au travail.

Elle est institutrice, et ne donne ses cours religieux qu’en fin de matinée, à une jeune génération, future force vive de son pays.

Comme à son habitude, elle prend son temps. Deux heures passent à flâner, discuter, partager un thé et s’épanouir.

Elle se contenterait bien de ce moment de douceur, mais il faut continuer le programme de la journée.

 

Elle arrive sur la rue. Le soleil éclatant l’aveugle quelque peu au sortir du marché couvert. Elle pose par réflexe sa main au-dessus de ses yeux,

l’ombre soulageant son champ visuel.

Un camion maraîcher s’arrête près d’elle. Curieuse, elle se tourne pour voir qu’elle marchandise ils vont décharger.

Le conducteur lui sourit, la tête enrubannée pour se protéger de la chaleur. Elle lui rend son sourire, trouvant la tristesse de ses yeux noirs,

troublante.

Elle se fige un moment, l’angoisse pointant dans sa poitrine. Elle sait ! Son panier lui échappe des mains, l’homme a joint les siennes.

 

Le nuage épais qui envahit la ville étouffe les cris.

 

L’âme respire une dernière fois l’air poussiéreux de sa vie et là, elle n’y verra plus rien, son souffle est en exil.

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