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Cette année le printemps est capricieux!

Il ne daigne pas inviter l'ami soleil qui aimerait certainement rayonner dans le grand ciel uniformément bleuté.

 

 

Et non, aujourd'hui encore l'orage perdure. Des averses incessantes inondent les toits, les rues, les gens.

 

 

Marianne court sur le trottoir enjambant de larges flaques d'eau. Elle se dirige vers la pharmacie la plus proche, son parapluie vient de se retourner d'un violent coup de vent.

 

 

C'est donc les cheveux et le visage ruisselant qu'elle franchit la porte automatique de la pharmacie, après s'être cognée bruyamment contre le vitrage. Ce qui a eu pour effet de détourner l'attention d'une dizaine  de clients sagement aligné aux quatre caisses.

 

 

Dehors des éclairs fusillent le ciel laissant tomber des grêlons cinglants.

Une journée vraiment exécrable!

 

 

Marianne la trentaine, moyennement normale ni grosse ni maigre, enfin un corps normalement constitué.

Belle, plutôt particulière, un regard innocent, un sourire éclatant, des cheveux mi long bouclés.

Particulièrement gaie, heureuse, vivante!

 

 

- " C'est quand tu veux! Dès que tu te sens prête, tu commences! "

 

 

Elle pose discrètement une main sur son oreille gauche, comme pour dissimuler la voix qui l'accompagne depuis ce matin.

Son sourire se fait plus insistant sans doute pour masquer le malaise de son entrée fracassante, et de cette voix qui semble bourdonner dans sa tête.

 

 

Une jeune fille en blouse blanche s'avance vers elle.

 

- " Vous désirez?

 

- Moi?

 

Elle se retourne, personne.

 

- Ah! c'est bien moi! non, je ne désire rien.

 

Toujours ce délicieux sourire aux dents parfaites, parfaitement saines.

 

La blouse blanche s'éloigne.

 

- Ah oui!

 

La blouse blanche refait face.

 

- J'ai besoin de monnaie, s'il vous plait.

 

Froncement de sourcil interrogatif de la pharmacienne.

 

- C'est--- pour me peser.

 

Et elle désigne d'un doigt l'appareil juste sur sa droite. L'employée hoche la tête et rejoint sa caisse.

 

- Tu es géniale! Continue ma belle!

 

Encore cette voix nasillarde.

Retour de la blouse blanche avec quelques pièces.

 

- Merci, c'est gentil! "

 

Marianne retire son manteau, son écharpe, son gilet et les posent sur la chaise à côté de la balance.

Très à l'aise, elle s'accroupit pour délacer ses chaussures, les retire et les range sous la chaise.

Des clients regardent la scène en souriant, d'autres observent intrigués.

 

Puis Marianne déboutonne son chemisier.

 

- " Plus lentement, ne te presse pas, laisse les te remarquer! "

 

La voix dirige, la voix amplifie l'oreille de la jeune femme.

 

La chemise est à son tour bien pliée sur le siège.

Des têtes se détournent scandalisées, des petits rires étouffés, des murmures s'élèvent.

 

Enfin Marianne descend la fermeture de son pantalon et le laisse glisser sur ses pieds.

 

- " Oh! Oh!

 

Une dame interpelle le pharmacien et désigne la jeune délurée qui---qui se retrouve en sous vêtements sur la balance!

 

- Tu es parfaite! Superbe!

 

Félicite la voix.

 

- Mademoiselle! S'il vous plait!

 

La cinquantaine, les cheveux grisonnant.

 

- Mais enfin vous faite quoi?!

 

- Je me pèse, tout simplement.

 

- Vous êtes dans une pharmacie!

 

- Ma balance est en panne alors j'emprunte la votre, mais j'ai payé!

 

- J'entends bien, mais pas aussi---déshabillé---

 

Murmure et regard gêné.

Marianne hausse le ton.

 

- Je ne me pèse jamais avec mes vêtements! C'est pas logique pour l'exactitude du poids!

 

Les clients ne se gênent plus pour rire ou critiquer sèchement cette jeunette effrontée.

 

- Provoques-le!

 

Encourage la voix.

 

- S'il vous plait, vous pouvez dégrafer mon soutient gorge?

 

- Non! Non et non! Mademoiselle, je vous somme de vous s'habiller immédiatement, sinon---j'appelle la police!

 

Marianne le regarde droit dans les yeux et hardiment.

 

- Vous n'oserez pas!

 

- Bien sur que oui!

 

Silence dans l'assemblé.

 

- Ok! Appelez la police!

 

Toute la pharmacie suit ce spectacle délirant.

 

- Magnifique! Quelle audience! L'audimat explose!

 

Clame la voix hystérique.

 

- Tu as gagné!!

 

- C'est formidable! J'ai gagné! "

 

Marianne saute au cou du pharmacien sous les regards éberlués des clients. Ce dernier la repousse doucement croyant vraiment avoir affaire à une folle, peut être échappée d'un asile psychiatrique.

 

 

Deux agents de police en uniforme entrent dans la pharmacie. Derrière eux s'engage un cameraman en plein tournage, deux journalistes appareils photos et blocs notes en mains, et un animateur, la voix qui clame.

 

- " Tous! vous venez d'être filmé pour l'émission, vidéo gag! "

 

Eclat de rire général, confusion du pharmacien intimidé, qui accepte quand même la bise de Marianne.

 

 

Voila comment se distraire en campagne lorsqu'un déluge pluvieux déferle dans les rues.

 

 

Attention à vous! A bientôt de vous piéger!!!

Tag(s) : #Textes des auteurs
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