Suite au mariage de Constance, la reine des elfes, et de Solstice, Le roi des Trolls n'y tient plus.
Triste conséquence du bal des elfes et des lutins...
Troll là là itou…
- Comment est-ce possible ? Comment ont-ils osé ? Foi de Gromle, roi des Trolls, les choses n'en resteront pas ainsi !
- Mais, votre puante grandeur, en quoi sommes-nous concernés ?
- De quoi ? Mais sacrebleu, as-tu l'esprit si égaré ? D'abord, quelqu'un a-t-il été invité de part chez nous ? Sommes-nous si méprisables qu'on ne mérite qu'être oubliés dans un coin, à sécher comme de vieux fagots ?
- Je dois dire, si votre ignominie me le permet, que peu de créatures terrestres nous trouvent fréquentables, hormis quelques gobelins ou autres orcs.
- Qu'importe, un faire-part accompagné de quelques friandises aurait été la moindre des politesses, eu égard à nos liens du passé. Non rien d'autre que l'écho d'un bourdon qui poussait sa sérénade pour colporter la nouvelle.
- De plus, si je ne l'avais pas attrapé dans mon escarcelle, il voletterait encore dans le bois des lutins en lâchant quelques perles…
Blind, accroupi prés du feu, regarde Gromle s'agiter et arpenter le lit du fleuve dont la fougue semble à peine résister à ses cagneux genoux. Il frotte frénétiquement sa toison hirsute, comme s'il chauffait le terrain pour quelques parasites.
- Mon noble roi, pourquoi donc prendre ombrage de cette nouvelle qui semble enchanter l'ordre sylvain tout entier ?
- Tu as raison. C'est mon ombre qui s'abattra sur eux. Se réjouir. Quel mot abject. Leur mielleux bonheur me donne la nausée. Imaginer ce stupide chef des lutins des bois uni à la plus belle reine des elfes, me fait bouillir de colère.
- Les temps changent mon maître et, politiquement parlant, ce n'est peut-être pas un mauvais choix.
- Poli… quoi ? Grmff… Mais où vas-tu donc percher des expressions pareilles ? Comprends-tu toi-même la moitié des mots que du déglutis ?
- Ben, c'est grâce aux cours du soir du mage Estueu et…
- Quoi ? Ce livreur de serments à sornettes ?
Gromle s'immobilise un instant. Il penche sa lourde masse vers ce qui lui sert de rejeton.
- Dis-moi Blind, es-tu sûr de ne pas abuser de l'herbe de Fidish ces derniers temps ?
- Non, père. J'ai réussi à m'en désaccoutumer pour mieux méditer sur mon nouveau carma.
- Ton quoi ? Ce satané mage a dû te lancer un sort ou trouver le moyen de faire pousser une cervelle dans la coque vide qui te sert de tête. Mais là ce n'est pas mon souci. Sache qu'il y a un peu plus de deux siècles, Constance et moi étions très liés
- Vous et la future reine ? Beurk !
- Nous étions alors deux jeunes créatures avides de découvertes. Nous partagions toutes nos expériences. Je me souviens qu'un soir, sur la grève du lac Keducha, nous fîmes serment de ne jamais laisser les instances de nos clans interférer entre nous. On rêvait de
l'avenir.
- Non, là j'ai vraiment du mal à imaginer.
- Plait-il ? Evidemment, grandir sous l'influence de nos tribus respectives, nous a fatalement éloignés. Ce lien qui paraissait pourtant si fort s'est peu à peu estompé. Mais un serment est un serment. Moi, je n'y ai jamais dérogé.
- Il y a pourtant eu la trolle Tinette…
- Un stupide égarement.
- Merci pour moi.
- Suffit ! Ce satané Solstice me le paiera. Non content d'être le plus riche des lutins, voilà qu'il me vole mes rêves.
- Mais père, La jalousie vous plonge dans une colère complètement disproportionnée vis-à-vis de l'événement. Ce n'est rien d'autre qu'un vulgaire mariage, après tout.
- Dans ce cas, nous allons arroser ça à ma manière. L'épaisseur des orages que je vais faire abattre sur leur stupide forêt, n'aura d'égale puissance que ma propre colère. Ce sera le prix de cette trahison. Les chimères pleureront tant et tant qu'elles submergeront les abris des lutins. Mes éclairs brûleront l'âme des Sylvains. Qu'ils s'abrutissent de leurs festivités, je leur servirais ma rage en bouquet final.
- Nous allons encore nous mettre à dos les communautés avoisinantes.
- Aurais-tu peur de leur ridicule magie ? Va au-delà des grands puits, les elfes noirs n'attendent que mon signal.
- C'est une guerre de raison dont le mage m'a tracé l'horizon.
- Désormais, fais-moi le plaisir de mieux trier tes relations. La lumière n'est pas faite pour nous. Vois, le vent tourne, le souffre de la terre s'éveille, la tempête gronde… Fais vite, et que notre bal commence !