Ecoutez bien la froide complainte des champs.
Le vent balaye la flore toute émoustillée Qui se réveille d'une langueur frigorifiée Par la bise hivernale de ce vent complaisant.
Seuls les rugueux osent battre de leurs ailes L'air sec du solstice d'hiver qui s'installe.
Les perles de rosée ont laissé place au givre, Donnant à la vallée une allure rigide.
La nature recroquevillée attend que se délivre Le souffle du printemps, pour le suivre tel un guide.
Mais aujourd'hui, un malicieux lutin s'est amusé A recouvrir ce canevas d'une blancheur mortelle.
Toujours seuls, les corbeaux lancent leurs appels.
L'écho s'empresse de saisir leur triste sérénade Pour la pousser au loin, la perdre dans le froid Où elle va doucement s'estomper.
Constance, la tête posée contre le carreau de la fenêtre, Voit l'aube timidement s'ébrouer sous son regard égaré.
La résonnance de sa vie s'est mise en grève.
L'Ankou l'a emporté dans son escarcelle.
Quand elle y pense, son vieux cœur s'emballe.
Elle l'imagine qu'il est déjà aux soins des bêtes, Qu'il réapparaîtra le dos chargé de fagots, Les bras encombrés de friandises, pour réchauffer son être.
Mais la roue de la vie ne fait point d'incartade, Le lourd balancier du temps fait sa loi, Les heures de complicités ne sont plus qu'un doux rêve, Les bruyants silences qui l'entourent seront ses derniers mots.