Je me rappelle le soir du onze mars ! L'annonce de la nouvelle m'a laissée sans voix.
Toujours cette hyper sensibilité incontrôlable qui se manifeste si différemment : bouleversements et réponse immédiate quand il ne s'agit pas des miens , décalage et dans un premier temps retenue, quand ma tribu se trouve en cause, après, vient le déluge !
Là encore, l'émotion m'envahit mais reste comme censurée, plus encore que 'habitude, mille fois plus ! Impossible de lui ouvrir les vannes, de m'y réfugier, même après coup ! Je me sens incapable de faire corps et cœur avec cette nouvelle, mais juste en ce qui me concerne ! Bizarrement, je n'éprouve aucun problème pour l'accueillir avec bonheur, chaleur et l'inscrire dans leur réalité à eux, mais dans la mienne, elle reste irréelle, du domaine de la science fiction. Je n'arrive pas à ajouter cet évènement à ma propre existence. Je vis dans un temps suspendu.
Je subis cette étrange et déstabilisante absence de matérialité me heurtant au sentiment d'être encore une fois hors normes ou pas prête devant ce qui devrait être évidence, certitude ! La joie, le bonheur, l'inquiétude se révèlent bien présents mais comme dans en rêve. Je suis entourée, mois après mois d'une bulle d'attente, comme une protection, une armure, un cocon, je demeure chenille attendant de devenir papillon, je me recroqueville à l'abri de ma chrysalide !
Et puis arrive le coup de téléphone tant espéré ! Toujours dans un état second je cours vers toi. Et là, mes bras t'entourant, ton regard magnifique plongé dans le mien, c'est l'électrochoc, la délivrance, c'est toi, mon petit bout de chou, toi seul, qui me fait enfin naître à mon nouveau statut ! Et les larmes de joie n'en finissent pas de bercer mon cœur ! Pour la première fois je suis grand-mère !