Nus dans la neige et dans la brume, mes godillots pèsent à mes pieds engourdis. Gauchement, je m'extirpe pas à pas de la profonde couche blanche qui ne cesse de s'épaissir. Je ne distingue quasiment plus rien du sentier que j'ai pour coutume d'emprunter. Seul mon instinct m'apparaît comme mon guide suprême et ultime dans cette tourmente. Surtout ne pas ralentir, encore moins m'arrêter au risque de me perdre corps et âme… Mon esprit presque divague maltraité par mon corps exténué. Mais il me faut à tout prix poursuivre ma route si je ne veux pas me faire prendre par la nuit et le froid qui m'envahit de plus en plus.
Et puis soudain, dans ce désert de silence, un son d'abord presque inaudible et qui pourtant m'interpelle. Le bruit sourd des tas de neige croulant de sur les branches m'empêche pour un court temps d'identifier ce son. Mais je le sais d'ores et déjà salvateur. Alors je tends l'oreille attentivement. Je reconnais là rapidement le jappement de mon brave Patou et à mon tour, j'émets comme des râles pour, par la suite, appeler plus clairement mon fidèle ami. Je devine sa silhouette sombre à travers le manteau blanc puis le vois distinctement, avançant avec difficulté, mais pas sans fierté, vers moi. Mon compagnon va sans nul doute me mener à mon gîte où je ferai un feu dans l'âtre.
Et cette souffrance ne me tourmentera plus.