La lune rouge s'éteint. Une main géante gantée de cuir laqué se pose sur l'étonnante chaîne démesurée.
Maudit rêve récurrent. Toujours le même. Sombre et étouffant.
Je vole. Je plane. Bats de l'aile et puis le néant. La commotion.
Je rentre la tête. Je courbe l'échine. Je tombe.
Black-out. Tous mes sens sont sens dessus dessous. La rigidité cadavérique s'installe à table. Deux couverts sont posés devant moi. Je n'y comprends trop rien. Pourtant je suis seul. Seul à regarder le miroir teinté. Ma peur prend au premier coup d'œil cet aspect verdâtre de l'oliveraie défraîchie de l'imaginaire tel un masque facial en poudre d'argile verte.
Le vide total. Le gouffre. La descente aux enfers. L'odeur pestilentielle du relent abject des icônes mortuaires du passé.
Puis ne demeure que l'acuité intemporelle du noumène dans l'œil improvisé du créateur expérientiel d'émotions en devenir.
Ce matin, à l'heure où l'aube se levait en bâillant, d’une main incertaine j’ai ouvert la porte de bois sculpté de la penderie de la chambre d'amis. La brume opaque de l’indécision obstruait encore la possibilité d’utiliser mes choix réfléchis. Je récidivais. Mes égarements mentaux s’évanouissaient en des bâillements débilitants. Excessifs et enclins aux répétitions machinales, ils me conduisent alors tout droit vers le lent réveil obligatoire. Nécessaire.
Poussée malhabile vers la gauche des cintres au vernis abîmé. La blondeur mielleuse du papier peint aux grosses fleurs exotiques me surprend. Mes doigts subissent des tremblements sournois à la découverte de cette tunique indienne. Des arômes de cumin, de curcuma et de safran chatouillent mes narines sensibles. Je vois tout en rouge.
J'endosse ma tenue marocaine. Le tissu soyeux caresse ma peau basanée. Mes poils s’étonnent et s’ouvrent à un plaisir cutané novateur. Presque provocateur. Plaisir érectile tant escompté depuis des lustres. Espoir tout aussi perverti du cerveau sexué animalier.
Cette djellaba avec capuchon fait aujourd’hui partie d’une collection importante et impressionnante des infinis souvenirs qui garnissent les tablettes poussiéreuses de mon cerveau.