Haut dans le ciel bleu azur des nuages blancs et obèses paressaient et s'effilochaient en passant au dessus de la roue. Celle-ci se dressait fièrement et hautainement au milieu des autres attractions, sûre de sa supériorité et contemplant la foule qui se pressait déjà à ses pieds.
Il faut dire que c'était une roue très particulière. Empruntant son système aux vieilles sirènes du Mississipi, c'était une magnifique roue à aubes. Chaque matin les pales s'élançaient, emportant les chanceux tirés au sort, qui auraient une occasion unique de se plonger dans les méandres de leurs espoirs, de leurs actions passées, parfois de leur futur afin de jouer ou rejouer la partition de leur vie et de lui redonner une nouvelle direction. Ou non.
Chaque aube était comme une nouvelle promesse, le cliquettement du départ une nouvelle naissance, le grincement à l'arrivée le début d'un nouveau chemin. Seul le hasard du vent décidait du sens de la journée. Et la file en bas s'étirait, un coup vers la gauche, un coup vers la droite, et les gens serpentaient, abandonnant lentement leurs soucis, se concentrant sur des pensées créatrices, prêts à affronter la route de la bonne ou mauvaise fortune.
Au milieu de la foule Moussa avançait doucement, les yeux levés vers la grand ‘roue magiquement malicieuse, le poing serré sur son ticket de la dernière chance.