Je m’endors dans tes bras calmement mon bébé, si calme
et si paisible à la fois, que je dois, de tes yeux nouveau nés,
te désarmer sans doute par tant de fragilité !
Pour toi ce nouvel être, qui dérange ta vie, il n’est qu’un étranger,
tu l’observes, tu l’épies : « va –t’il me plaire, vais – je le détester ?
Va - t’il sourire, va - t’il pleurer ? » Tu me connais si peu,
sauf du passé récent une voix en sourdine
avant le grand événement
peut-être…
Vois, je m’enfouis tout entière dans les plis de ta chair
potelée. Me repaissant de ta peau
dévorant ton corps nu
qui m’offre sans calcul, sans frein, sans retenue,
ses rondeurs, moi ta mère, moi ta tendre inconnue.
Je les mords goulûment, en ultime refuge
et le lait maternel vient apaiser mes faims.
Plus tard, en grandissant, tu trouveras pour moi
des jeux et des jouets tout pleins de fantaisie
des poupées des soldats et des cubes de bois
que je te jetterai juste pour te faire rire.
Je m’endors dans tes bras calmement mon bébé
tu me chantes des airs que je ne connais pas.
Qui sait si cette nuit trouvera
à ta voix un écho
à tes cris d’autres voix
d’autres forces de vie
si petit, si puissant, mon bébé, je t’envie !
Bientôt, tu guideras nos sorties quotidiennes
par tes regards instruits, ton assurance pleine
tu m’offriras du fin fond de ta bulle
un minois pur et rose
et des yeux bleus si clairs
que j’y lirai presque comme à ciel ouvert
l’épure de nos doutes
l’esquisse du bonheur.
Je m’endors dans tes bras calmement mon bébé
toi tu veilles sur moi, en veilleur perspicace
car du bout de tes doigts
sans t’avoir informé
tu les nommes par cœur :
mes accrocs mes erreurs
mes déroutes mes peurs
mes manques mes absences
mes craintes mes faiblesses
et tant de maladresse
tant d’attentes fébriles
toutes les fêlures
toutes les brisures
toutes les déchirures
tous les morceaux éparpillés
à recoller
de mon amour fragile
pour toi mon adoré
qui m’a fait naître à la vie.