C’était une fille intemporelle, légèrement décalée, vivant dans ses rêves, si discrète, derrière la fenêtre !
Dans sa cage de verre, la demoiselle rêvait, oiselle emprisonnée, de sveltes envolées vers de verts paradis qu’elle ne verrait jamais.
Elle rêvait d’amours imaginaires, de princes brevetés, de contes de fées dûment étiquetés. Elle croyait au bonheur assisté.
Elle ne parlait jamais, Muguette, de ses rêves muselés. Elle restait muette, abandonnée, cœur bâillonné, l’âme recroquevillée derrière la fenêtre qu’elle n’ouvrait jamais.
Tel un bourgeon tardif que l’hiver saisirait encore tout encorseté de résine, elle s’était fanée, tout enrubannée de rêves, toute chiffonnée dans son prénom suranné.
Premiers émois, premiers frissons de mai… Après l’adolescence vint l’âge de raison, puis les flétrissures de l’arrière-saison, puis la défloraison.
Sage comme une image elle attendait l’éclosion.
Quand vint l’ultime heure de l’ultime oraison : « Est-ce toi », dit-elle au Visiteur de l’ultime moisson, « est-ce toi, Bonheur ? Quelle émotion ! »
Nul n’eut le cœur de lui dire que non.
Et comment lui expliquer que la pendule avait disparu à jamais ?