Il était une fois une petite Juliette, innocente, toute heureuse de vivre, de jouer, ne se posant aucune question. Et pourtant !
Elle vivait avec sa maman et… son tonton. Situation un peu étrange. Mais c'était dans l'ordre des choses. Le non-dit était respecté.
La petite Juliette grandissait et commençait à réfléchir. Elle se rappelait vaguement d'un papa à moustaches, qui piquait lorsqu'il l'embrassait. Pourquoi ne venait-il plus jamais la voir ? Sa maman lui répondait évasivement. " Il a trop de travail, mais il reviendra bientôt…."
Plus elle grandissait et plus Juliette devenait curieuse. Au grenier il y avait dans un vieux meuble un tiroir qu'on lui interdisait d'ouvrir.
Mais pourquoi ? Quel trésor pouvait s'y cacher ?
N'y tenant plus, Juliette décida de briser l'interdit. D'une main tremblante elle ouvrit ce fameux tiroir !
Tout d'abord une image lui sauta aux yeux : celle d'une dame endormie entourée de cierges ! Puis elle aperçut une enveloppe "adressée à Juliette"…
Pas de doute, elle lui était destinée ! Elle n'avait qu'une hâte, lire cette fameuse lettre. Mon Dieu... Si elle avait su !
Sur le coup, elle ne comprenait rien. Comment cette dame osait lui dire qu'elle était sa vraie maman ? Elle l'appelait par son prénom, lui disait qu'elle était sa petite fille chérie et qu'elle l'aimait tellement ! "Malheureusement, je suis gravement malade et je suis obligée de me séparer de toi. Je ne pourrai plus te câliner, te serrer dans mes bras. Je te confie à ma sœur, ta tante Sandrine qui prendra le plus grand soin de toi. Adieu ma petite fille adorée ! Je pars pour un long voyage dont on ne revient pas ! ".
La photo était sûrement celle de sa mère mais elle ne dormait pas. Elle devait être morte. Juliette se sentit défaillir. Elle ne pouvait pas supporter cette douloureuse révélation.
Elle entendit sa maman-tante lui dire : "pauvre petite, tu as découvert la lettre n'est-ce pas ? Je voulais te dire la vérité mais je savais que cela te ferait tellement de peine !".
Juliette sanglotait. Elle voulait que sa tante soit sa maman à elle !
Elle n'avait aucun souvenir de l'autre maman. Elle avait encore un papa dont elle se souvenait, pourquoi avait-il cessé de venir la voir ?
Alors là, ce fut vraiment le drame.
Sa soi-disant mère lui dit que son père était mort dans un accident de voiture peu de temps après sa mère. L'atroce vérité lui était enfin révélée. Elle était une petite orpheline, un petit oiseau tombé du nid que sa tante avait recueilli. Elle n'était plus rien, rien qu'une pièce rapportée ! Juliette se sentait humiliée, blessée, presque honteuse.
Comment oublier cette terrible journée ? Maintenant Juliette ne mangeait presque plus. Elle était obsédée par la lettre, la photo de sa mère entourée de cierges, et le souvenir de ce papa si gentil qui lui piquait les joues avec ses moustaches !
Mais le temps a fait son œuvre. La vie étant plus forte que le chagrin, les souvenirs s'estompèrent. Elle finit par accepter ce destin. Si cruel !
Juliette a continué d'appeler sa tante "Maman". Peut-être pour effacer de sa mémoire l'affreuse image de la "dame aux cierges", cette mère qu'elle n'avait jamais connue.