Il fait frais ici. Tant mieux ! Parce que les chaleurs écrasantes, non merci. Le maquillage coule, ravage le visage… On devient rapidement un monstre alors que l’on doit être la reine de la journée, de la soirée, du week-end.
Dehors, le soleil est resplendissant pourtant. Mais il ne fait pas une chaleur caniculaire en cette petite île de pierres taillées grossièrement. Ah non. Si on regarde d’un peu plus près, le travail semble minutieux. Bon bref, il faut qu’on s’active !
Il est drôlement beau de profil, ce jeune homme à côté de moi. On dirait un véritable étalon, au sang pur évidemment. Un sentiment de force émane de sa personne, et irradie tout autour de lui. Je suis contente d’être si proche. Je le regarde à loisir.
J’aime beaucoup son nez aquilin. Cela lui donne du caractère. Il en a d’ailleurs du caractère, rien qu’à en juger par ses gestes posés et sûrs d’eux. C’est vrai, on dirait qu’il sait tout le temps où il va, qu’il connaît la destinée et avance sans peur.
J’aimerais être comme cela.
Ses chaussures m’ont immédiatement appris que j’avais à en découdre avec un maniaque du net, de la propreté. Mais ce n’est pas si mal, un homme qui aime faire le ménage. Ça veut dire que la femme en a moins à faire. Voici donc ce que je pouvais déduire de ses chaussures, mais la semaine uniquement, lorsqu’il travaille. Sinon, pour le week-end, le style est radicalement différent : baskets avachies, telles ses fringues bon marché. On dirait qu’il a deux personnalités. Côté travail, il est un personnage en vue, alors il rentre dans le moule, chaussures Weston, boutons de manchettes en platine, chemises ultra soigneusement pressinguées, etc.… Et de l’autre côté, habits simples, ordinaires, mais souples et confortables, et aussi, donc, des chaussures très vieilles, qui doivent d’ailleurs sentir la mort, depuis le temps qu’il les traîne…
Ses mains en mouvement sont un présage de bonté, de tendresse, mais de force aussi. La chevalière qu’il porte à l’annulaire droit est magnifiquement dessinée. Un bijou sur sa main, et je rêve qu’il est généreux, qu’il en offre toujours, facilement, à ses amis.
Sa voix… sa voix me laisse rêveuse, objet de pâmoison. Sa voix est chaude, me remue le cœur et les sens. Elle traverse ma moelle épinière et me raconte que je ne suis qu’une pauvre femme, sous l’emprise de ses sens. Sa voix… Elle est masculine à souhait, chaude, vibrante, cassée parfois.
Il fait de plus en plus chaud ici, sans doute parce qu’il y a beaucoup plus de monde que tout à l’heure.
Si je devais le noter, je lui donnerais vingt-huit sur vingt, tout simplement parce qu’il est un rayon de soleil, le fils de cet astre, un apollon actuel.
Elle me semble perdue dans ses rêveries, comme souvent. Elle a alors cet œil sauvagement allumé par une idée dont elle déroule si vivement le fil. Elle passe d’un sujet à l’autre, ça, j’en suis sûr. Pas du coq à l’âne, non, mais rapidement, genre « ça, c’est fait. Suivant. »
Son regard est chaud et velouté. Encadré par une nuée de mèches souples et plutôt rebelles. Elle est d’ailleurs, ça se voit tout de suite, du style à ne pas se laisser dicter sa loi.
J’aime regarder ses mains, fines et petites. Si fines qu’elles en paraissent encore plus délicates. On ne saurait jamais quel bijou choisir pour orner de tels joyaux ! Mieux vaut encore les baiser, tout simplement. Elles sont l’image de la douceur et de la fermeté tout à la fois. Elles sont gage de félicité.
J’aime parcourir, sans qu’elle le sache, son profil. La rondeur de son visage est accueillante et bienveillante. Sa bouche est celle d’une personne sachant profiter de la vie.
La première fois que je l’ai vue, j’ai tout de suite su qu’elle était tout ce que je cherchais. Une petite poupée fêlée. A cajoler. Qui veut se montrer forte, mais qui a des faiblesses comme tout le monde.
Elle aime beaucoup, apparemment, porter des chaussures de styles entièrement différents. Elle passe, avec énormément de facilité, de l’escarpin, pointant son museau effilé et noir vers vous, à la basket, classe mais basket quand même. Est-ce un signe de versatilité ?
On me demande mon avis, le monsieur en face de moi. Je dis oui, bien sûr. Qu’attend-il d’autre comme réponse… ?
Elle est très loin, amarrée à une idée qui semble la ravir, car elle sourit. A moins que ce ne soit à moi qu’elle…
- Ninon ? Ninon !
- Hein ? Ah, euh, je n’ai rien fait, je le jure ! Euh…non, je suis d’accord. Absolument. Oui.
- Ninon, je répète. Souhaitez-vous prendre pour époux Hector ici présent ?