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Mon cœur, j’ai fermé la porte pour que tu ne viennes plus me harceler. J’y ai mis les moyens : blindage, cadenas, verrous.

Mais ce n’est pas suffisant, des tambourinades d’hémoglobine frappent, des râles cardiaques transpercent l’armure.

Je ne pouvais plus faire face à ce trop plein d’énergie, à tous ces sentiments diffus qui voulaient s’emparer de moi, m’aliéner, m’ensevelir, me recouvrir de glaires sanguinolentes.

Mon cœur, je te tues à te taire, je te lessive d’eau pure, transparente à t’en rendre rosée.

Ce que je voulais être apaisement s’est mué en tempêtes, en rafales sanguinaires, en vacarmes ventriculaires. Cette mélopée qui enserre ma tête dans un étau, chaque temps resserrant son emprise un peu plus : pam pam pam pam pam pam…

Ce muscle d’horloge qui égrène ses battements comme des secondes, compteur qui me rapproche de plus en plus de la mort.

Mon cœur, tu es bien utile oui, tu es le moteur qui propulse la vie à travers mes veines, qui gorge mes poumons d’oxygène.

Mais c’est trop pour moi, je ne sais qu’en faire. Toutes ces forces qui se mélangent et dont je ne sais plus, si c’est pour mon déclin ou pour mon salut.

J’aimerais simplement percevoir le dégoulinement d’un ru tranquille, le gargouillement de sa source paisible, rythmé au tempo régulier d’un clapotis, berceuse qui me réconforterait d’un sommeil angélique. Musique originelle qui teinta à mes oreilles d’individu en construction dans le ventre de sa mère.

Mon cœur, ton enfermement ne sert à rien, ton courroux n’a fait que prendre de l’ampleur, tu heurtes le battant tel le bélier contre le pont-levis des châteaux forts.

Tu brûles de ta lave rougeoyante les matières qui pourraient s’enflammer, se désagréger. Un interstice par lequel t’échapper, te répandre, me submerger.

Mon cœur, c’est toi ou moi. Tu me procures la vie, tu m’instilles la mort.

Es-tu mon ami ou mon ennemi ?

Je ne te fais plus confiance, tu m’as si souvent trompée.

Je doute, et tu te doutes que dans ces moments-là, je ne veux que me cacher, me terrer dans la poussière, cette poussière que j’ai été et que je redeviendrai.

Dans les cendres des meurtrissures de mon âme, la seule chose qu’il me reste.

Cendres encore chaudes, foyer d’une existence passée, chaleur prodiguée par tes soins, car tu n’es jamais loin mon cœur.

Si tu pouvais seulement me laisser me reposer, ne plus penser à rien, je serais plus disposée à te rouvrir la porte.

Mais tu n’as pas de répit à mon égard. Tu veux lécher de tes flammes farouches cette peau qui enveloppe celle que je ne suis déjà plus.

Tu veux me faire périr sur le bûcher de ta haine, moi la sorcière aux dons incompris, aux pouvoirs interdits : ceux d’aider et d’être sincère, ceux de rêver et d’en être fière.

Mon cœur, ce que tu ne sais pas, c’est que ce monde-là est indestructible, et que même si parfois tu parviens à l’ébranler, il se stabilise toujours.

Peut-être a-t-il besoin de temps  en temps de quelques roulis pour se réveiller et se sentir bien vivant !

Ta houle vengeresse ne fait que rallumer son désir de persévérer, son envie de briller.

Je sais alors, mon cœur, que sans le savoir, tu es mon ami, indomptable, irremplaçable.

Tag(s) : #H.S. des auteurs
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