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Maintenant, s'il voulait survivre, il lui fallait faire du feu, Uriel n'était pas ce qu'on peut appeler un aventurier, il n'avait jamais fait de grands voyages, à part celui-ci qui, on peut le dire, ne lui avait pas vraiment réussi et s'était soldé par le naufrage du rafiot sur lequel on l'avait embarqué un peu malgré lui, lui qui n'avait pas vraiment le pied marin et avait vécu jusqu'ici dans le confort d'une petite vie bourgeoise où il se complaisait, ma foi, très bien. Par chance, ayant appris quelques astuces par des potes scouts, notamment comment on pouvait allumer un feu en frottant des pierres ou en attirant le soleil sur de petites brindilles à l'aide d'un objet faisant office de miroir, Uriel entreprit de mettre ces petits trucs à profit, mais sans  y croire vraiment.

 

C'est en réitérant son geste pour la ènième fois qu'il crut entendre des frôlements ou des bruits imperceptibles de branches déplacées dans les fourrés tout proches. Il tenta de percevoir de droite et de gauche d'où venaient ces bruits, mais rien ne bougea plus et la plage retrouva son grand calme. N'ayant pas réussi à allumer de feu, Uriel se coucha dans un trou en haut d'une sorte de dune, pour échapper aux vents qui, maintenant redoublaient de violence et s'endormit d'une masse.

Au réveil, le vent s'était calmé, Uriel reprit ses tentavives de feu et au bout de quelques longues minutes, une flamme tremblotante jaillit, vacillante, incertaine et Uriel fit un berceau de ses mains pour la protéger. Jamais,avant ce jour, il ne se serait douté, lui, le petit bourgeois nanti , qu'il lui faudrait à ce point lutter pour obtenir ce qu'il y a peu , il pouvait se procurer sans peine. Des larmes roulaient le long de ses joues, il venait d'apprendre les enjeux de l'effort ainsi que les plaisirs de la  réussite.

A présent, il lui fallair entretenir ce feu, et veiller à ce qu'il ne s'éteigne pas, mais avant tout, il lui fallait boire, ses lèvres le brûlaient et sans eau, il savait qu'il n'en avait plus pour bien longtemps. Uriel gravit la pente de la dune et se retrouva sur un petit plateau dominant la mer. Au loin, quelques arbres exotiques, qu'il n'aurait pas su nommer, il se dit que c'était là peut-être la voie du salut et partit lentement à la recherche d'un point d'eau. Par bonheur, les fortes pluies de la nuit avaient laissé des traces et avaient rempli quelques trous du chemin. Uriel se plaqua au sol et lappa bruyamment le liquide comme un chien assoiffé pourrait le faire.

Relevant la tête pour prendre de l'air avant de retourner à son "puits",  c'est là qu'il aperçut, à demi dissimulée derrière un arbre, une forme bizarre, inquiétante, à laquelle il n'aurait su donner de nom, bête ou humaine, hybride ou rescapée de la préhistoire, yéti, loup-garou, que sais-je encore. Uriel eut si peur que sa vue s'en troubla instantanément, il ne savait si ce qui retombait le long du dos de cette immonde créature était une crinière, ou une chevelure, ou une fourrure qui l'enveloppait complétement et lui donnait des airs d'homonculus à grands poils !

 

Tout à coup la "chose" émit un long grognement, à demi-singe, à demi humaine et secoua énergiquement la tête en guise de protestation. Uriel ne bougeait pas un seul petit doigt et espérait ne pas être repéré. Mais la chose avait de l'odorat, et se mit à rétracter ses énormes narines velues en soufflant et reniflant bruyamment avec des bruits de cochon ayant trouvé une truffe géante. Uriel ne bougeait toujours pas, tétanisé. Au bout de longues minutes qui lui parurent un jour, Uriel se risqua d'un oeil vers la chose et vit ses yeux jaunes briller, d'une lueur si épouvantable qu'il crut s'évanouir. Il resta donc plaqué au sol et attendit.

 

Il ne sut jamais combien de temps il était resté allongé près de cette mare boueuse et fétide et si la bête était toujours là, à l'épier. Les bruits avaient cessé, Uriel se releva et entreprit de retourner à son camp. Il ne mangerait pas encore aujourd'hui, car il avait trop peur de faire une nouvelle et terrible rencontre. Qui sait si la forêt n'était pas pleine de ces êtres immondes, vivant en autarcie et sans aucun prédateur, ayant établi leur suprématie et leur puissance sur ce coin de terre et sur l'île entière, où ils pouvaient vivre et se multiplier tout à loisir.

 

Uriel repartit abattu et sans force au bord de la plage, inquiet que son feu n'ait pas résisté au vent et qu'il lui faille reprendre l'opération de la veille à son début. Heureusement, de loin, il aperçut la lueur vacillante, mais vivante, poussa un ouf de soulagement, mais il ne savait pas encore que là-bas, l'attendait une autre surprise...
 

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