C’est l’hiver ! Y' est arrivé comme chaque année ;
Sans crier gare ! On dit qu’il a mené grand train.
Quelle gare ? Vous dites… ? On m’le demande à chaque fois ;
Je m’en souvins pus, d’ailleurs, je m’demande même si je l’ai jamais su.
Et puis qu’eq ça peut faire, d’toute façon, il est là, comme chaque année.
On ne sait jamais quand il arrive, mais quand il est là, on l’sait.
Comment qu’on l’sait ? On sait qu’on ne sait jamais,
L’outrecuidant, lui s’est ben installé, confortablement, dans les sillons gelés.
Les arbres en ont perdu leurs feuilles et l’potager est tout déserté ;
L’aut’e soir, tellement fort il a toussaillé, que des branches du tilleul en sont tombées,
Mais, pour s’faire pardonner, une couverte blanche sur le sol, il a déposé.
Au matin, le thermomèt' y savait pus ou aller,
Quelle température vous dites ? Moins queq’chose mais c’est sans intérêt,
Alors le soleil s’est l’vé, éclaboussant de lumière la nature immaculée,
Tout était calme, engourdi, les sons avaient tous étaient étouffés ;
Plus rien ne respirait, comme si la terre était inanimée ;
J’ai pris mon foulard, ma tuque, mes mitaines et mon parka et j’sus allé le rencontrer,
Mes premiers pas furent laborieux, j’ai dû chausser mes skis d’randonnée,
Il m’a fallu faire un bon bout, lorsqu’il s’est manifesté, j’en ai eu la moustache gelée,
Au bout d’mon champ, il était là ben implanté avec sa grande cape enfarinée,
Pas très causant le bougre, mais qu’à cela ne tienne, je l’ai tout d’même salué,
Qu’est-ce qu’il m'a dit, vous m'demandez ?
Il a pas bronché l’drôle, j’imagine qu'il d’vait être éberlué de m'voir aussi près,
J’ai goûté au silence des marmottes et des oiseaux et au paysage argenté,
Puis, je lui dis d’aller se faire voir ailleurs, il a pas moufté, tant pis, je m’en suis r’tourné,
Bah! Je m’faisais pas d’illusions, je savais qu’il était là pour rester, comme chaque année.
De toute façon, c'est pas la peine de s'énerver, on peut rien y changer,
Alors, autant profiter d’la neige et de ses bienfaits, en attendant le retour de l’été.