Elle pousse la porte entrouverte, fatiguée par son long voyage en train. Elle aperçoit immédiatement sur la table le chorizo coupé en tranches fines sur la planchette, un formulaire complété à demi, une chemise de son père oubliée sur le dossier d'une chaise, couverte de taches de peinture. Le brouhaha de la foule lui parvient par la fenêtre béante, les cris conquérants des manifestants, les coups de sifflet des policiers, les pétards stridents et les exclamations scandées en chœur.
Son visage exprime une surprise non feinte, elle écarte une mèche de cheveux rétifs et s'approche du téléphone. Celui-ci est décroché, le combiné laisse échapper un léger sifflement continu. C'est bien la preuve, si besoin en était, que quelque chose ne tournait pas rond.