A Bernadette
J’ai suivi mon destin au fond de quelque grotte
Mes yeux se sont ouverts à l’ombre des grands bœufs
Qui ornaient les parois de ces antiques pierres
Au temps des sombres nuits des peuples millénaires.
Je me suis éblouie aux peintures rupestres
Ai fait mien cet émoi qui nous prend en flânant
Le soir, suivant les traces d’une main ou d’un geste
Le galop d’un cheval, la corne d’un élan
Une horde de loups, un bestiaire étonnant.
J’ai couché sur ma toile les ocres éternelles
Les couleurs, les reflets des sables naturels
Et sous mes doigts d’artiste, toujours renouvelés
La vie, la mort, l’amour et la beauté mêlés
Aux merveilles du jour, aux trésors oubliés.
Je me suis enrichie aux parois des cavernes
Deviné une forme sous les murs ruisselants
De l’albe Santander aux verts pays arvènes
J’ai trempé mon pinceau dans le sang de nos pères.
Je suis de tous les temps, j’ai mûri, j’ai grandi
Tiré de vos leçons, peuples dits primitifs
Un esprit en éveil, moderne et créatif
Inspiré du passé, tourné vers le futur.
Ma toile est inusable et mon œuvre pérenne
Me poursuivra légère, en me prêtant ses ailes
Car je vivrai en elle, et elle à travers moi
Je penserai à vous, vous penserez à moi
En disant : "c’est elle qui me donna naguère
De sa main le trait pur, de ses yeux la lumière."