Chère Cloclo,
Je t'écris pour te dire que voilà bien longtemps que je ne t'ai rencontrée. Tu étais l'amie avec laquelle je m'entendais si bien, mais la vie nous a séparées et reconnais que c'est un peu de ta faute, car tu n'es pas, avoue-le, ce qu'on appelle une amie très fidèle ! Tu m'avais juré, le jour de tes 15 ans, qu'on ne se quitterait jamais, que quoiqu'il arrive, nous serions toujours là pour nous porter secours . Et pourtant, lors de ma grave maladie, un peu plus tard, tu n'as répondu à aucun de mes appels au secours. Tu continuais à sortir avec toute la bande, sans t'apercevoir que ta meilleure amie traversait des moments difficiles ! Et pire encore, tu as profité de mes moments de faiblesses pour me piquer mon petit ami avec qui je sortais depuis un an. Une fois ma guérison, il n'a plus voulu me revenir, j'ai su que tu l'en avais empêché, alors que tu n'éprouvais plus aucun sentiment pour lui !
Je voulais savoir si après tant d'années, ton caractère avait un peu évolué, si tu étais enfin devenue fidèle en amitié comme en amour, si on pouvait compter sur toi, même dans les pires moments de la vie ! Avoue qu'en ce temps-là, tu étais tout de même une bien sale petite garce !
Question physique, as-tu un peu évolué ? Tu étais bien mignonne, certes, mais tes rondeurs t'empêchaient souvent d'accomplir les gestes quotidiens de la vie. Souviens toi, en gymnastique, tu ne passais guère la barre des 80 cm et tu arrivais toujours la dernière à la course. Tout le monde se moquait de toi, et toi, tu t'en fichais ! Tu arrivais le matin en classe avec un sac rempli de pâtisseries que tu ne voulais partager avec personne ! Pourtant, ils avaient l'air bien savoureux les éclairs que ton père avait confectionnés le matin même. J'en aurais bien mangé juste une petite bouchée, histoire de les goûter ! Mais tu as toujours refusé de partager !
C'est drôle, malgré ton égoïsme légendaire, eh bien moi, je t'aimais, j'étais bien la seule d'ailleurs, je ne sais pourquoi, tout le monde se détournait de toi, et moi, je venais pleurer dans ton giron, tout en sachant que je ne t'attendrirais pas par le récit de mes malheurs !
Dis-moi, Cloclo, fais-tu toujours autant de fautes d'orthographe ? C'est vraiment incroyable que l'on soit à ce point hermétique à la grammaire et à la syntaxe ! J'espère que cela ne t'a pas trop nui dans ta vie future et que tu as trouvé un job où l'on n'adresse jamais aucun courrier à personne !
As-tu des enfants, et combien ? Tu te souviens comme tu étais dure avec tes frères et soeurs, surtout les petits, tu ne supportais pas leurs pleurs, te souviens-tu du jour où tu as emballé le dernier-né dans un drap et l'a offert généreusement à la voisine, sous prétexte qu'elle ne pouvait pas avoir d'enfants ? Et le jour où tu as failli l'étouffer sous son oreiller, juste pour ne plus entendre ses cris ! Je pense que l'âge venant, tu te seras améliorée et que, si tu en as eu, tu as su les rendre heureux !
Chère Cloclo, donne moi vite de tes nouvelles, je serai si heureuse de reprendre contact avec toi, je sais qu'au fond, tu n'es pas une méchante fille et que tu peux être très généreuse, j'aimerais tant savoir ce que tu es devenue ? Je t'embrasse très affectueusement.
P.S. Es-tu toujours aussi brune, et as-tu toujours tes jolis cheveux bouclés qui t'allaient si bien ? Réponds-moi vite, j'ai hâte de connaître tout de ta vie actuelle !
Annette, Ton amie de toujours.
Chère Annette,
Je te trouve un peu dure avec moi, étais-je l'horrible adolescente que tu décris là, sans pitié et insensible à tes malheurs ? Si je n'ai pas fais grand cas de tes petits bobos, c'est que tu exagérais toujours tes malheurs et que je te trouvais un peu trop hypocondriaque à mon goût. Quant à la fidélité, tu ne peux pas dire que tu l'étais vraiment, fidèle, plutôt volage, oui, et ton soit-disant petit ami ne t'a jamais vraiment aimée, il me l'a dit, il faisait cela pour épater la galerie et frimer auprès de ses copains de classe ! Je suis désolée si je te l'apprends aujourd'hui, mais je pense qu'il ne faut pas que tu te fasses trop d'illusion sur tes capacités à plaire aux hommes. J'espère que tu as évolué de ce côté-là, car dans le cas contraire, cela voudrait dire que tu es toujours seule, et cela ne me surprendrait d'ailleurs qu'à moitié !
Me traiter de sale petite garce, là, je trouve que tu y vas un peu fort ! Si tu m'écris uniquement pour me dire cela, ne compte pas sur moi pour renouer avec toi ! D'ailleurs, je ne t'ai jamais vraiment considérée comme une amie, une banale relation de lycée, tout au plus ! Quant à mon physique, tu peux parler, sèche comme tu étais, si tu crois que tu avais le moindre attrait ! Un vrai tas d'os, oui, et puis, ton acné qui a duré jusqu'à tes 18 ans bien sonnés ! Tu avais beau te mettre toutes les crèmes et toutes les eaux de rose possible sur la peau, aucune ne pouvait venir à bout de ton physique par trop ingrat ! Quant aux choux à la crème, tu n'avais qu'à aller te les acheter toi-même, mon père ne se levait tout de même pas à 4 heures tous les matins pour engraisser des filles comme toi !
Ceci dit, si tu veux que l'on se revoie pour évoquer les bons moments de notre scolarité, on peut toujours se trouver un créneau, n'oublie pas d'apporter tes bulletins scolaires de l'époque, qu'on s'amuse un peu, et que l'on comptabilise le nombre de colles que tu as eues grâce à tes bavardages et à tes leçons non apprises.
Allez, à bientôt, chère Annette, et ravie de t'avoir retrouvée, je t'embrasse très très fort.
CLOCLO, ton amie fidèle, qui ne t'oublie pas.