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Il est assis sur le perron, l’air dubitatif, son carnet de notes sur les genoux. Il cherche à s’évader une fois de plus, dans son monde imaginaire, fait d’impertinences jubilatoires, au vocabulaire totalement décalé. Il attend que l’étincelle vienne le percuter, poussant l’inconscience de sa main à purger son stylo, pour écrire ces lignes :

« Personnellement, j’ai toujours du mal à me concentpertrer, quand les circonstances sont trop calmes. Il me faut de la pervie autour de permoi pour que mon imagipernation s’active. Peine perdue ces jours où la désertion s’active autour de moi. »

Il relit, en souriant à ces mots où rien de pertinent ne ressort. A-t-il besoin d’un expert pour certifier la paternité de ses délires littéraires ?

Certes, non, surtout après un apéro bien arrosé où sa persiffleuse conscience essaie de tempérer ses élans alcoolisés. Il doit être quelque peu imbibé pour partir dans ce périlleux périple qu’est la narration. Il aurait voulu être beaucoup plus inspiré, écrire un livret d’opéra ou un ouvrage encore plus consistant, mais son esprit se disperse trop facilement quand il essaie de contourner les aspérités de sa frêle imagination, ces derniers mois. Il en revient toujours, dans ce cycle perpétuel, qu’à gribouiller des phrases illuminées, sans logique, aspergées d’une essence de délirium. Résultat de l’opération, encore du « machouillage » calligraphique.

Il observe, non loin, une épeire qui s’active sur sa toile. Elle au moins abouti à une œuvre constructive, pendant que le temps opère sur lui, vicieusement, une érosion intellectuelle avancée, où il sent le titillement de cette langue de vipère maladive qui le ronge. Imperturbablement, plus ça progresse, plus ses membres tremblent. Combien de fois a-t-il renversé le café sur le percolateur ces derniers temps ?

Son corps, ainsi perclus, ne semble plus totalement lui appartenir, et ses idées ont aussi subi une perte d’ampérage évidente à la vue du manque d’éclairage suggestif de ses réflexions. Puis quelle idée d’être venu se perdre au fond du Périgord, quand la présence d’un compère lui serait d’une grande utilité ?

La subtile déchéance perforant ses espoirs de rétablissements, l’amène à la triste observation qu’il va falloir accepter le fait que son talent soit à ranger aux rayons des pertes et profits, sans en espérer le retour.

Il referme son calepin, se lève, entre et referme la porte définitivement sur ses perspectives d’avenir, dans un dernier sursaut de perspicacité.

 

Tag(s) : #Textes des auteurs
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